Résumé

Un soir de 14 juillet de 1981 à La Réunion deux jeunes gens «eurent le malheur de se rencontrer». Le mariage a suivi de peu, quant à l’amour… il n'aura duré que cinq mois et vingt jours ! Contre toute attente, les Dessaintes finiront par donner naissance à une petite fille, qui n’est autre que la narratrice de cette histoire : « Qu’ils furent malheureux ces misérables Dessaintes avec une pisseuse à hochet dans leur salon ! Eux qui s’attendaient à un petit mâle bien comme il faut, au caractère tyrannique et à l’instinct querelleur. Un parfait imbécile en somme. » Et comme si cela ne suffisait pas, la petite se découvrira une passion que ses parents ne verront pas d’un très bon œil : la littérature…

Notre avis

Voici un premier roman au style particulièrement décapant ! Le cadre est l’île de La Réunion mais le lecteur l’aura deviné : nous sommes aux antipodes de la carte postale ! Gaëlle Bélem a en effet choisi de faire un récit sur les oubliés de l’île, où 40% de la population vit aujourd’hui sous le seuil de pauvreté : "en matière d’inégalité, on fait partie des territoires français les plus forts", souligne-t-elle ; donner une voix aux sans-voix et dénoncer le drame de l’ignorance à La Réunion sont parmi les principaux objectifs de ce livre.

Le récit est parsemé de clins d’œil littéraires, qui pour la plupart ne manquent pas d’ironie : le nom des infâmes parents les Dessaintes est par exemple directement inspiré du livre A Rebours de Joris-Karl Huysmans, dont le héros se nomme Jean des Esseintes ; mais les parents, descendants d’esclaves, ne sont pas aristocrates, et leur comportement est plutôt digne des Deschiens que des saints ! Le récit de leurs aléas sentimentaux, sur fond de crise économique, témoigne quant à lui d’une parenté (revendiquée) avec les romans de Michel Houellebecq.

Gaëlle Bélem évoque également les auteurs antillais, qu’elle admire (Frantz Fanon, Aimé Césaire, Edouard Glissant, Patrick Chamoiseau, Maryse Condé et Raphaël Confiant) et se désole que la littérature réunionnaise bénéficie pour sa part de si peu de rayonnement. Mais en devenant la première romancière réunionnaise à être publiée par Gallimard, Gaëlle Bélem va sûrement changer la donne !

Jean-Loup Médiathèque André-Cancelier